samedi 10 juillet 2021

Mince alors… Comment sont morts mes aïeux ?

 

Photo credit: omnia_mutantur on Visualhunt.com


            Je vous propose une nouvelle rubrique sur le blog, s’adressant uniquement à mes élèves de généalogie. Avec Mince alors… je vous propose des pistes pour répondre aux questions qui sont le plus régulièrement posées soit par mes élèves débutants, soit sur les réseaux sociaux. Vous savez ces petites interrogations qui surgissent forcément à un moment où à un autre dans votre parcours de généalogiste amateur. Pour inaugurer cette rubrique voici une question régulièrement posée sur les groupes de généalogie Facebook : « Comment trouver la cause de décès de mes ancêtres ? ». Cette fois mes réponses ne concerneront que la France. Nos amis d’outre-manche se posent par exemple beaucoup moins cette question, le certificat de décès indiquant la cause de ce dernier.

            L’acte de décès français, qu’il soit issu de l’état civil ou des registres paroissiaux, nous apporte un grand nombre d’informations. Pourtant il est extrêmement rare d’y trouver les raisons du décès. Il existe tout de même quelques exceptions notables comme celle relatée par Rémi Azemar. Le chercheur a détaillé son étude des registres de la Roque-Sainte-Marguerite de 1721 à 1742. Leur particularité ? La cause du décès est indiquée sur la quasi-totalité des actes[1]. Ceci reste relativement rare. Il existe tout de même quelques pistes à explorer si la mémoire familiale ou la correspondance privée n’ont livré aucun indice sur la cause de décès de ceux qui vous ont précédés.  

            Piste n°1 « La presse » : Comme d’habitude je vous revoie vers la presse ancienne, facilement consultable pour les XIXe siècle et XXe siècle. Si vos aïeux sont décédés de façon peu ordinaire il est probable que cela ait laissé une trace.

Les morts accidentelles : Un accident peut laisser une trace, du calvaire local tombé sur un malheureux passant à l’accident de tramway ayant fait plusieurs victimes, différents articles peuvent vous apprendre les circonstances d’une mort violente. Une noyade peut aussi être relatée ou un accident de chasse, des causes relativement courantes dans les siècles qui nous ont précédés.

Les meurtres et accidents du travail : Voici deux exemples de mort qui font en général les choux gras des rubriques des faits divers de la presse locale et nationale.

Les suicides : Promenez-vous dans Retronews, vous découvrirez que le suicide est un sujet qui fait l’objet de nombreux articles dans la presse d’hier. Certains suicides font parfois l’objet d’un article dans la presse, pour peu qu’il soit exceptionnel (forme de suicide inhabituelle ou suicide de plusieurs membres d’une même famille).

Les disparitions en mer : Les familles de marins sont trop souvent amenées à perdre leurs hommes en mer. Avec le nom du bateau vous trouverez peut-être des articles concernant la perte d’un membre d’équipage ou bien le naufrage du navire.

Les avis de décès : Sans entrer dans les détails, les avis de décès peuvent parfois donner des indices. Par exemple les remerciements au personnel de l’hôpital ou les formules comme « après une longue maladie » permettent de supposer le contexte de la mort.

            Piste n°2 « Les archives hospitalières » : Je vous le concède la mort entre les murs d’un hôpital n’est pas des plus courantes chez nos ancêtres. Tout de même, n’ignorez pas ces archives si dans un acte le décès dans un établissement de santé est mentionné. Des archives ont existé, si elles n’ont pas été détruites, essayez de les consulter, il arrive parfois que l’on trouve les causes de la mort. Les descendants de parisiens peuvent par exemple creuser du côté des archives en ligne de l’APHP.

            Piste n°3 « Les morts en temps de guerre » : Mourir en temps de guerre laisse toujours des traces, aussi bien pour les civils que pour les militaires.

Victimes des conflits contemporains : Parfois la fiche matricule pour les hommes mobilisés offre déjà des indices sur le parcours médical et le lieu de décès. Attention ne vous arrêtez pas là. Vous pouvez par exemple vous adresser au Bureau des Archives des victimes des conflits contemporains. Leurs archives sont très riches est pourront vous indiquer s’ils possèdent un dossier individuel sur les personnes qui vous intéressent, qu’elles soient civiles ou militaires. Cela concerne aussi bien les morts en France (soldat au combat, victime des bombardements…) que les français morts hors du territoire (prisonnier de guerre, STO, déportés…). N’oubliez pas que pour ces cas, les archives AROLSEN peuvent aussi vous livrer des indices.

Les registres d'état civil des régiments de la guerre : Peu connues ces sources sont parfois riches en enseignement quant aux circonstances d’un décès durant la première guerre mondiale. Malheureusement ils ne sont pas encore numérisés et doivent être réservés pour consultation via les archives nationales. Vous y trouverez en général la cause du décès d’un soldat, qu’elle résulte d’une blessure reçue au combat ou non, d’un accident, et même d’un suicide.  

Le cas des fusillés : La mémoire familiale a parfois enfoui le souvenir des fusillés. "Mémoire des hommes" propose désormais une base qui s’enrichit progressivement pour les fusillés de la première guerre mondiale.

Les archives de la Croix rouge : Pour les prisonniers des guerres mondiales, de la guerre civile espagnole, ou d’autres conflits contemporains, la Croix rouge peut parfois conserver dans ses archives des informations précieuses sur le décès des personnes qu’elle a recherchées.

Piste n°4 « les archives de la justice » : Les archives du système judiciaire peuvent largement nous renseigner sur les circonstances qui ont mené au décès d’un de nos ancêtres.

Les victimes : Si l’une des personnes qui vous intéresse est décédée suite à un accident impliquant d’autres personnes (patron, conducteurs de véhicule, passagers des transports…) il est possible qu’une enquête et même un jugement ait laissé des traces. Soit dit en passant, ça vaut aussi pour les accidents n’ayant pas entraîné la mort mais une blessure.

Les condamnés à mort : Les archives judiciaires offrent aussi la possibilité de retrouver les condamnations à mort.

Piste n°5 « Catastrophe climatique et épidémie » : Il arrive parfois que l’on déniche un registre où le rythme des décès s’accélère brutalement. Il se peut aussi qu’un hameau entier soit décimé. Dans ce cas il est intéressant de se pencher sur le contexte de l’époque. L’idéal, quand on travaille sur une longue période sur une zone précise, c’est d’établir une fiche avec les grandes catastrophes qui ont maillé le territoire. Heredis, par exemple, indique quelques événements météorologiques (canicule, sécheresse, hiver glacial...) lorsque vous travaillez sur une période mais c’est bien insuffisant. Les monographies locales vous donneront souvent de nombreuses réponses.

Les épidémies : Pour les épidémies, le Covid 19 a été l’occasion de sortir un grand nombre de parutions sur celles qui ont marqué l’histoire. C’est néanmoins sur des sites qui regroupent les articles des chercheurs de toutes les régions que votre pêche aux informations risque d’être la plus efficace. Rendez-vous, par exemple sur persee.fr, voici le type de publication qui peut être d’une grande utilité à vos recherches :

-          BECCHIA Alain. « Des villes épargnées ? L'épidémie de choléra de 1832 à Elbeuf. » In: Annales de démographie historique, 1990. Démographie des villes et des campagnes. pp. 53-70.

-          KINTZ Jean-Pierre. « Une épidémie en Basse-Alsace  en 1786. » In: Annales de démographie historique, 1968. pp. 386-388.

-          Calastrenc Carine. « La circulation des populations par les cols luchonnais en période d’épidémie : l’apport des registres de la commission sanitaire de 1821 à 1822. » In: Culture et modes de sociabilité méridionaux. Actes du 126e Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, « Terres et hommes du Sud », Toulouse, 2001. Paris : Editions du CTHS, 2007. pp. 135-143. (Actes des congrès nationaux des sociétés historiques et scientifiques, 126-4)

Les archives départementales, dans le cadre d’expositions par exemple, ont parfois déjà fait des recherches sur les événements locaux, n’hésitez donc pas à vous adresser à elles.

Piste n°7 « Tables de successions et d’absences » : C’est extrêmement rare, je n’ai vu le cas qu’une fois pour un décès au XXe siècle, la cause du décès est indiquée sur une table de successions et d’absences. Sait-on jamais, vous pouvez tenter votre chance.

 

Pour la plupart de nos aïeux et de leur collatéraux, les causes de leur décès resteront inconnues. Bien sûr nous supposeront que…

-          … cet homme d’un âge plus qu’avancé a été emporté par les conséquence de la vieillesse.

-          … cette jeune femme, inscrite dans le registre quelques jours après le baptême de son bébé, est morte des suites de l’accouchement.  

-          … cet enfant décédé à l’adresse d’une mine ou d’une usine a été victime d’un accident de travail.

Néanmoins j’espère que grâce aux pistes que j’ai pu vous exposer certains décès pourront être expliqués dans votre généalogie. Il en existe quelques autres, j’évoque ici les principales possibilités. Néanmoins les commentaires vous permettent de partager votre expérience si vous avez fait des découvertes via d’autres créneaux.  

Photo credit: Eva the Weaver on VisualHunt

J’espère que cette nouvelle rubrique vous plait, si c’est le cas n’hésitez pas à indiquer en commentaire d’autres questions récurrentes qui pourraient vous intéresser. Rendez-vous en août pour un nouvel article dans cette rubrique : Mince alors… où trouver des photos de mes aïeux ?

Bonnes recherches estivales.

P.S. : Il reste des places pour commencer les cours de généalogie à l’automne, sur l’agglomération nantaise, n’hésitez pas à m’envoyer un mail pour en savoir plus.



[1] Azémar Rémi. Les causes de décès à La Roque-Sainte-Marguerite de 1721 à 1742. In: Annales de démographie historique, 1984. Démographie historique et généalogie. pp. 239-258.

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