Lors de mes premiers cours de généalogie, avec mes grands débutants, notre discussion passe en général par un point de vocabulaire : AD, sosa, souche, enfant naturel, degré de cousinage, implexe… tenez arrêtons-nous sur ce dernier mot. La notion qu’il recouvre semble particulièrement ardue pour les néophytes. Je ne sais pas si je l’explique mal, c’est probable, mais je sens que mes élèves ne sortent pas totalement satisfaits de mes explications. Essayons donc d’écrire et d’illustrer ce cas, auquel de nombreux généalogistes seront confrontés. Pour cela quoi de mieux qu’une bonne histoire ?
Il
était une fois, à l’église de Guiclan dans le Finistère, un couple de jeunes
bretons prêts à se dire oui devant l’autel. Faisait-il froid en ce mois de
février ? Je n’en sais rien, mais c’était la saison des mariages, Olivier
BRETON et Jeanne SIMON (SYMON), commençaient ici leur histoire commune. Nous
sommes en 1683, de leur union naîtront, en l’état de mes recherches actuelles,
sept enfants.
Point
définition n°1 : N’aurait-on pas perdu le fil de notre article ?
Non, rassurez-vous. Un implexe commence ainsi, par un aïeul parent d’au moins
deux enfants (Olivier ou Jeanne dans notre cas feront l’affaire).
Dans
la nichée de Jeanne SIMON, on trouve deux sœurs qui vont être le nœud de notre
problème : Marguerite BRETON (1685-1706) et Jeanne BRETON (1696-1777). La
plus âgée des deux se marie en 1703 à Jean HIRIEN, elle meurt alors que sa
fille unique, Catherine, a un peu plus d’un an. Jeanne, la tante de la jeune
orpheline, vivra, elle, jusqu’à l’âge respectable de 80 ans. Mariée à Jean
GUILLERME, elle a au moins six enfants. C’est son fils aîné, François
(1726-1779), né l’année suivant le mariage de ses parents qui va nous
intéresser pour la suite de notre histoire. Je ne lui connais qu’un fils ayant
atteint l’âge adulte.
Point
définition n°2 : Vous êtes perdu ? Retenons les points
principaux, il faut que deux branches au moins, issues de notre ancêtre aient
eu une descendance. On distingue donc une branche « Marguerite » d’un
côté et une branche « Jeanne » de l’autre.
Les
descendants de Marguerite prospérèrent. En 1763, un de ses arrière-petits-fils
vit le jour à Saint-Thégonnec, Jean FLOCH, premier de sa lignée à ne naître ni
à Guiclan ni à Plouvorn. Il finira ses jours à Pleyber-Christ. Peu à peu donc,
cette branche commence à avoir la bougeotte. Le fils de Jean naît et meurt
aussi dans deux communes différentes. En 1904, un bébé pousse son premier cri dans
un hameau d’Huelgoat, mon arrière-grand-père descend directement par sa mère,
Marie Anne LE FLOCH, de Marguerite BRETON.
Qu’est
devenue pendant ce temps la branche de Jeanne ? Comme les descendants de
Marguerite, ceux de Jeanne ont quitté Guiclan, une partie d’entre eux est
arrivée à Pleyber-Christ dans les années 1820. En 1884, Jeanne Yvonne GUILLERM
est inscrite dans le registre de l’état-civil, mon arrière-grand-mère a pour
aïeul Jeanne BRETON.
En 1974,
dans un port du Finistère sud, mes parents se disent oui devant l’autel. Le
mariage a lieu sous la bénédiction du soleil de juin. La mode a changé, on se
marie à la saison où les aïeux étaient obnubilés par le travail de la terre.
Mes parents ignorent alors que dix générations auparavant un couple d’ancêtres
communs à leur deux arbres regardaient aussi un prêtre inscrire leur nom dans
un registre paroissial. A ma naissance, trois siècles après celles de Marguerite
et Jeanne, je descendais par deux branches distinctes d’Olivier et Jeanne
BRETON.
Point définition n°3 : Olivier
et Jeanne apparaissent donc au moins deux fois dans mon arbre. Un ancêtre
apparaissant ainsi à plusieurs reprises dans l’arbre d’une même personne (le
sosa 1 ou la souche de ce travail généalogique) est donc un implexe.
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/!\ Point d’attention /!\
Nous
n’aurons pas tous la même quantité d’implexes. Je m’étonne à vrai dire de ne
pas en avoir trouvé plus dans mon arbre, mes parents ayant de nombreuses
communes en commun dans leurs arbres respectifs. Certaines situations sont plus
propices à l’apparition d’implexes, par exemple :
-
Une faible mobilité géographique de vos aïeux.
-
Une certaine endogamie dans certaines corporations.
-
Des spécifiés religieuses réduisant les possibilités
de mariage.
-
L’optimisation de transmission des titres ou des biens.
-
Le regroupement des communautés d’immigrants par
origine géographique commune.
Un implexe célèbre ?
Victoria,
reine du Royaume-Uni, est parfois qualifiée de grand-mère de l’Europe. En
effet, sa nombreuse descendance dans presque toutes les familles
aristocratiques du continent s’étant croisée régulièrement pour échanger des
alliances, elle devient ainsi un super implexe. Les enfants d’Elizabeth II
descendent ainsi par leur mère, née à Londres, et par leur père, né à Corfou,
de Victoria. Pas de proximité géographique comme mes ancêtres mais une
rencontre due à la fois à une proximité de classe sociale et aux migrations
conséquentes aux troubles politiques et à la guerre.
Je vous invite donc à vous pencher
de plus près sur vos arbres, étudiez donc vos doublons. Il se pourrait bien que
vous soyez passé à côté d’un implexe. Notez une dernière petite chose
importante, plus vous remontrez, plus vous aurez de probabilité de tomber sur
des situations comme celle-ci, c’est mathématique. J’espère, après cette
lecture, que ce terme n’aura plus de secret pour vous.
Pour ceux que le sujet aurait
passionnés, Laurent Nabias propose une série d’articles remarquablement précis
sur le sujet. Je vous invite à parcourir son blog, en particulier :
-
Recensements
de circuits matrimoniaux – C’est quoi donc ? Épisode I
-
Détection
automatique de mariages consanguins et de redoublements de mariages – EPISODE
II
Bonnes recherches à tous.
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