vendredi 1 septembre 2023

Mince alors, en généalogie, servir sur un plateau n’est pas toujours aider.


            Aujourd’hui on va parler généalogie, mais ce ne sera ni conseil de lecture ni astuce de la rubrique. Depuis quelques temps je reçois des messages qui me laissent pantoise. Il m’a semblé important d’y consacrer un billet, pour remettre les choses au point et aussi pour interroger la communauté généalogique très présente sur internet. Avez-vous aussi été confronté à ce type de demande ? Avez-vous noté un accroissement de ces messages?

            En plus des cours à domicile que je propose dans le cadre de mon activité professionnelle, j’aide aussi en ligne les généalogistes amateurs. A ce titre je ne suis qu’une parmi d’autres, répondant au message sur les groupes Facebook par exemple. Il y en a qui font bien plus et bien mieux que moi dans ce domaine. Mes fiches-conseils sur le blog sont à cheval entre mon travail et mon envie de donner des conseils au plus grand nombre de débutants. Il m’arrive suite à mes interventions sur les groupes ou la publication d’un article de recevoir des messages, en découlent souvent de très intéressantes conversations.

            Pourtant, parmi ces messages en arrivent désormais qui me demandent non plus de les aider mais de faire les recherches à leur place. Premièrement, quand j’aide en généalogie, je privilégie toujours l’explication de la démarche à la réponse sèche qui ne permet pas au chercheur de progresser. J’estime que si on ne souhaite pas comprendre et apprendre à chercher, on peut tout à fait se payer les services d’un généalogiste familial qui a fait profession de chercher pour les autres.

I : Les infiltrés ?

            Il y a quelques temps j’ai noté en messagerie privée, mais aussi sur certains groupes des demandes qui exigent auprès des généalogistes amateurs des documents. Je pense que nous avons ici à faire à des personnes qui ont besoin de ces documents pour des démarches administratives. Si vous refuser de les aider, elles ne lâchent pas le morceau, insistent et reviennent à la charge. En voici un exemple (c’est sa 5e tentative) (orthographe, ponctuation et syntaxe d’origine), j’ai remplacé par des astérisques les noms qui permettent d’identifier des données personnelles :

« Monsieur :j ai l honneur de venir très respectueusement par présenté vous 
demander de bien vouloir me envoyer information complète Et leDOCUMENTS 
ADMINISTRATIFS de mon grand-père k******* L*** Date de naissance ** **** 
1915 lieu d'augmentation ***** ********** Algérie mort à ** ******** 1944au 
combat lors de la guerre sous le drapeau français Dans l'attente d une 
suite favorable veuillez agréer monsieur l'expression de mes salutations 
distinguées S'il vous plait j'ai besoin de votre aide et merci.
Cordialement. »    

On a là un cas particulier, poussé au paroxysme de la demande insistante. Il pousse surtout la question suivante : A-t-on vraiment à faire à un généalogiste amateur ? Ou, plus probablement, à une personne qui n’entre dans ces réseaux que pour bénéficier d’un service gratuit ? Je me suis même demandée s’il ne pouvait y avoir une arnaque quelconque là-dessous tant ils sont tenaces. Ils tiennent souvent à passer en message privé ce qui me rend plutôt soupçonneuse. Je ne vous donnerai qu’un conseil quant à ce genre de cas, passez votre chemin, ne donnez pas suite, ça ne mène à rien. 

II : Paresseux ou naïfs ?

            Ne voyons pas le mal partout, une partie des demandes qui attendent qu’on leur donne des renseignements relève d’une méconnaissance. Quand ils débutent, les nouveaux généalogistes s’attendent parfois à trouver tout d’un simple clic. Je prévois; dans les mois à venir, un article sur les sources primaires et secondaires, pour les aider s'y retrouver. Nos jeunes chercheurs partent donc la fleur au fusil, pensant que les vétérans vont avoir réponse à toutes leurs questions. Le problème est que certains d’entre eux demandent tout de suite non pas de l’aide mais la réponse. Une partie ne semble tout simplement pas comprendre le travail de fourmis que représente la généalogie, voici l’extrait d’un message lu, il y a quelques temps (là encore je masque l’identité de l’auteur, ce n’est pas la peine de lui tomber dessus à bras raccourcis) :

« [Un membre de ma famille] a réussi à faire 2 branches paternelles et 1 branche maternelle et il est remonté jusqu'à dans les années 1500-1600

Je voudrais savoir si quelqu'un qui aime bien chercher serait volontaire pour rechercher la dernière branche maternelle et peut être remonté plus loin dans le temps pour les autres branches

Merci pour vos réponses »

            Ici nous sommes face à une personne qui visiblement ne réalise pas ce qu’elle demande, on est dans  un cas presque caricatural, je vous l’accorde. La plupart du temps, les demandes qui espèrent des réponses toutes faites, semblent plutôt attendre que les membres du groupe d’entraide soient des magiciens. Je vous renvoie vers mon autre article Mince alors… Mes demandes d’aide en ligne restent lettre morte, que faire ? pour apprendre à bien poser ses questions sur internet.

            Il est possible aussi que ces personnes réalisent tout à fait le temps que cela implique et ne souhaitent pas le prendre. Elles pensent peut-être pouvoir profiter d’une main d’œuvre gratuite pour avancer leur arbre. Il est souvent difficile de distinguer les paresseux des naïfs. Nous pourrons reparler, dans un autre article si cela vous intéresse, des personnes qui pensent pouvoir trouver leur généalogie déjà toute faîte sur les sites. Sont-elles vraiment coupables, vu les publicités et aussi les articles qui vantent la possibilité de remonter en quelques clics, en un après-midi, votre arbre sur cinq générations, voir même jusqu’à la Révolution Française ?  

III : Comment bien aiguiller ces égarés de la généalogie ?

            Prenons une grande inspiration et gardons notre calme. Il arrive, trop souvent, que l’on s’agace et qu’une réflexion désagréable s’affiche sous la requête qui vient d’être postée. Certains participants ont l’impression d’être face à des consommateurs et s’emportent. Quelles solutions pour ne pas se crisper et pousser au travail les novices, tout en restant courtois ? Pour commencer n’oubliez jamais que vous avez été novice et que, peut-être, vous aussi vous avez fait des erreurs et des maladresses. N’oubliez pas non plus que personne ne vous oblige à répondre, si vous êtes un peu ronchon ce jour-là, le mieux est peut-être de laisser les autres se pencher sur la question. 

-          Si vous détestez vous répéter, gardez sous le coude des textes tout faits avec les explications de base. La série des articles « Mince alors », est née comme ça, ayant l’impression de retaper les mêmes réponses. J’en ai fait des articles qui, s’ils sont un peu standardisés, permettent finalement une réponse bien développée. Vous pouvez vous aussi créer vos réponses dans un fichier de traitement de texte et les copier/coller.  

-          Si la personne pose une question qui semble vraiment basique, ne lui envoyez pas un « Ouvre un livre » ou « Cherchez donc sur Google » ou « les moteurs de recherche existent ». Expliquez lui plutôt où cherchez l’information, si vous avez un ouvrage en tête, indiquez lui la référence. Je commence généralement mes cours de généalogie en présentant des livres pour démarrer qui m’ont été utiles à mes débuts. Alors conseillez aux débutants des premières lectures ou des sites qui vous ont guidé. Remettez-vous à leur place.

-          Si la question comporte un anachronisme, ne vous moquez pas de la personne. Par exemple expliquez lui que « né sous X », ne s’utilise pas au XIXe siècle, s’il fait cette erreur, c’est simplement que personne ne lui a expliqué. Autre exemple, une personne peut chercher des fiches matricules des conscrits en au XVIIIe siècle, prenez le temps soit de lui expliquer, soit de la renvoyer vers un lien qui lui expliquera l’histoire de la conscription. Il ne sert à rien de se moquer ou de hurler à l'ignorance.

-          Si la personne pose une question déplacée ou ne respecte pas les règles du forum ou du groupe, ne vous improvisez pas justicier. Dans toutes les structures en ligne il y a des modérateurs désignés que vous pouvez contacter facilement.

            Vous ne serez peut-être pas de mon avis, mais il me semble qu’il vaut mieux donner des pistes, expliquer les démarches de recherche. A mes yeux, ces demandent doivent être une étape pour apprendre et enrichir leur généalogie. Quand je donne un cours particulier, j’estime qu’il est réussi si mon élève, après s’être exercé à plusieurs reprises, est capable à son tour de transmettre la démarche qu’il a apprise à mes côtés. Quand je réponds aux débutants, j’espère aussi qu’ils pourront eux même, d’ici quelques semaines ou mois répondre à leur tour à un nouveau généalogiste.  

            Bien sûr parfois une personne est totalement bloquée, il est intéressant de participer à sa recherche, de l’aider à défaire le nœud. Moi-même j’ai parfois eu besoin d’un regard neuf sur mes recherches pour trouver une nouvelle piste. Il faut toujours mesurer le chemin déjà parcouru par celui qui vient demander de l’aide. Détaillez au maximum vos recherches, vous n’en serez que mieux épaulé pas les généalogistes les plus avertis.

Bonnes recherches à tous 



2 commentaires:

  1. Merci pour ce post qui dit tout haut ce que pensent tout bas ceux qui fréquentent les groupes de généalogie des réseaux sociaux et/ou qui reçoivent des demandes d'aide par messagerie.
    Pour ce qui concerne les ressortissants algériens qui recherchent une preuve de nationalité d'un ancêtre (votre exemple du paragraphe "les infiltrés"), ce sont malheureusement souvent de demandes d'aide de personnes qui veulent obtenir la nationalité française et qui ont été induits en erreur par une vidéo TikTok (d'un avocat algérien) qui dit qu'il suffit de "récupérer le papier aux Archives nationales françaises" pour accélérer son dossier.
    Je suis en train de préparer un article sur le sujet avec Bruno Ricard, Directeur des Archives de France car les AN sont assaillies de demandes également...
    Pierre-Valéry Archassal

    RépondreSupprimer
  2. Nous sommes tout en fait en phase, c'est bien pour cela que je réponds que sur des questions méthodologiques et que j'anime depuis 11 ans des ateliers INFORMATIQUE & GENEALOGIE

    RépondreSupprimer