vendredi 20 octobre 2023

Mince alors… La commune de mes aïeux est introuvable !

 


            Après un « Mince alors… » qui faisait le point sur certaines mauvaises habitudes, revenons à des articles qui se concentrent plutôt sur les obstacles que rencontrent les débutants. Aujourd’hui, nous allons nous pencher sur un problème plus commun que vous pourriez le croire : les communes introuvables. L’ancêtre qui reste insaisissable est un grand classique auquel se heurte rapidement tout généalogiste amateur. Il sait moins qu’il risque un jour de déchanter avec un acte ou bien tout autre document mentionnant un lieu qui sera inconnu au bataillon. C’est une frustration presque plus difficile à gérer que l’aïeul qui vous file entre les doigts. On est parfois convaincu qu’une fois le lieu déchiffré, le plus dur est fait. Eh bien pas toujours. Pourquoi donc certains lieux sont si compliqués à retrouver ? Nous allons nous concentrer principalement sur l’époque contemporaine puisque la « commune » naît avec la Révolution, beaucoup de ces pistes peuvent néanmoins servir aussi pour les paroisses introuvables.  

            Cas n°1 : La commune a changé de département ! C’est un des problèmes que j’ai rencontré lors de mes premiers pas en généalogie. Une de mes branches s’amuse à me promener entre les communes voisines d’Herbignac, Missillac, Assérac et Férel. C’est la dernière commune qui m’a fait m’arracher les cheveux plus d’une fois. La commune a en effet basculé lors du découpage des départements, passant du diocèse de Nantes au nouveau département du Morbihan. Il faudra un jour que je propose une version en ligne du tableau sur l’évolution des divisions administratives « Ancien régime/époque contemporaine » que je donne parfois à mes élèves en cours particulier. On trouve des parallélismes puisque de nombreuses communes reprennent en réalité le découpage des paroisses.

            Le changement de département est assez fréquent finalement depuis les plus de deux-cents ans d’existence de cette unité géographique. C’est bien embêtant puisqu’on apprend rapidement que celle-ci est notre référence principale en généalogie. Nous nous précipitons généralement, au début de nos recherches sur le site des archives départementales qui nous concerne. Rassurez-vous les institutions s’améliorent de jour en jour et créent des fiches pour vous indiquer où se trouvent les archives, dans l’ancien ou le nouveau département. Vous pouvez en voir un exemple sur le site des archives de l’Isère dont une partie des communes a été rattachée aux archives du Rhône.

 

            Cas n°2 : La commune a fusionné ! Plusieurs causes provoquent la fusion où l’absorption d’une commune et ceci peut compliquer singulièrement notre vie de généalogiste. Ceci arrive de plus en plus souvent. Un outil pour suivre ces fusions existe, l’INSEE propose son  Historique des communes en ligne. Vous allez donc pouvoir vous référer à cet outil pour vous y retrouver, surtout pour les derniers changements en date puisque ce drôle d’annuaire ne reprend que les changements depuis 1943. Si, dans les archives départementales, vous allez rapidement retrouver la commune en question, elle va cette fois-ci être, parfois, introuvable quand vous allez souhaiter la rentrer dans votre logiciel de généalogie. Pensez donc, si vous ne pouvez pas trouver la nouvelle commune dans la liste automatique, à ajouter un point en notes sur la fiche de l’individu.

            Certaines communes ont été absorbées, comme Doulon ou Chantenay par Nantes. Dans ce cas il faut parfois se tourner vers les mairies pour savoir comment ont été gérées les archives municipales. Dans ce cas particulier, les registres de Chantenay par exemple ne sont pas en ligne sur les archives départementales du 44, mais sur le site des archives municipales. Trouver un simple registre peut-être un jeu de piste avant même de trouver un acte. Parfois la généalogie est un parcours du combattant pour des problèmes de classification administrative.

           

            Cas n°3 : La commune a changé de nom durant la Révolution ! Passons le cas des fusions qui entraînent une modification du nom de la commune par suppression ou accolement des toponymes. Ici, je parle bien de changement radical qui rend la recherche très complexe. La Révolution est passée par là et nous arrivons à un cas qui m’amuse beaucoup en cours quand je l’explique à mes élèves. Parmi les bouleversements de cette période, la toponymie n’est pas en reste puisqu’on adapte aux temps nouveaux les anciennes références présentes dans les noms des villes. Je vais vous parler rapidement des communes mais ce phénomène touche aussi les rues par exemple. A ce propos vous pouvez lire Les changements des noms de rues sous la Révolution française. Revenons aux villes qui changent de nom, voici les raisons les plus courantes :

-         -  Une référence à un roi, une reine ou un prince, tout ce qui rappelle la royauté. C’est un phénomène qui touche surtout les communes à partir de 1792. Par exemple, dans le 56, Port Louis devient Port-Egalité ; en Haïti, Port-au-Prince se transforme en Port-Républicain. 

-         - Une référence à l’Eglise, une tendance qui se développe à la fin de l’année 1793. Par exemple, dans le 29, Pont-Croix se change en Pont-Libre ; dans le Gard, Pont-Saint-Esprit est remplacé par Pont-sur-Rhône.  

-         - Une référence à un château. Par exemple, dans le 44, Châteaubriant est modifié pour Montagne-sur-Chère ; dans les Vosges, Neufchâteau se transforme en Mouzon-Meuse.

Je ne vais pas vous détailler en long, en large et en travers les changements possibles, de bons articles peuvent vous permettre de compléter vos connaissances sur le sujet, comme celui-ci : République et « laïcité » : le nom révolutionnaire des communes de France sous le Consulat et l’Empire (et au-delà). Une grande partie des communes a récupéré leurs anciens noms, quelques-uns subsistent aujourd’hui. Pour la Loire-Atlantique aucun n’est resté en place.

Globalement, les archives départementales sont bien organisées et l’on retrouve les registres sous le nom actuel. Néanmoins, pour des débutants, un registre révolutionnaire est déjà semé d’embûches entre les dates si particulières et les prénoms parfois novateurs. Je comprends alors que ce nom nouveau de ville puisse décourager.   

 

 

            Cas n°4 : La commune n’existait pas ! Nos aïeux ne naissaient pas souvent à la ville, une grande partie de la population était rurale. De ce fait les enfants voyaient souvent le jour dans des hameaux et les lieux dits. Là encore les divisions administratives peuvent nous poser problème. Prenons l’exemple de Berrien (29) qui avait déjà, en tant que paroisse était redécoupée à plusieurs reprises, et sera morcelée plusieurs fois au cours du XIXe siècle. Ainsi la localité de Botmeur naît de ces nouvelles limitations administratives en étant rendue indépendante de Berrien. Si vous remontez le temps sur une lignée présente à Botmeur, vous pourriez donc être déstabilisé quand, arrivé en 1850, vous ne trouveriez plus de registre spécifique à cette localité. Il faut basculer sur Berrien pour remonter plus haut dans le temps. Pensez donc à bien établir une chronologie, même succincte des communes sur lesquelles vous enquêtez.

            Je vous conseille de manière générale de vous familiariser avec la géographie et les plans des communes que vous allez fréquenter régulièrement en généalogie. Vous pouvez par exemple utiliser géoportail pour vos premiers pas en histoire communale, avec les cartes d’état-major par exemple. Par ailleurs, les archives départementales proposent souvent de nombreuses cartes, cadastres et plans numérisés que vous pouvez consulter.

 

            Cas n°5 : La commune a changé de pays ! J’en conviens ce n’est pas courant mais cela arrive de temps en temps dans l’histoire de France. Dans plusieurs cas, en restant dans la même commune, vos recherches généalogiques vont vous faire voyager vers d’autres nationalités. Les communes changent alors de système administratif et parfois de nom, encore. Quand vous cherchez une commune donnée dans un acte, il est possible que vous ne la trouviez pas, simplement car son nom a été traduit à l’époque où l’acte est rédigé. Dans certaines régions comme l’Alsace la situation est récurrente entre les germanisations et les francisations des noms. N’hésitez pas à parcourir les nombreux textes des chercheurs qui se sont penchés sur cette question assez spécifique comme celui Christian Wolff. Le cas des difficultés de compréhension des archives dû à l’appartenance des territoires à différentes souverainetés existe à plusieurs frontières. Nous aurions aussi pu ici évoquer l’exemple de la Savoie devenue française en 1860 seulement.   

            Dans le cas de territoires frontaliers, vous allez donc vous trouvez souvent dans une chasse aux communes où il vous faudra surtout ne pas vous précipiter pour retrouver l’équivalent dans une autre langue.

 

            Suite à ces quelques exemples, j’espère vous avoir donné des pistes qui vous permettront de réfléchir sur les communes introuvables. En faisant de la généalogie vous retracez l’histoire de ceux qui vous ont précédé et inévitablement vous croisez aussi l’histoire des lieux où ils ont vécu. Je ne peux que vous inviter à faire un écart loin des actes pour consulter les monographies et les cartes pour vous imprégner des découpages cantonaux et communaux qui constituent l’univers de vos aïeux.

            Il existe cent raisons qui peuvent rendre une commune introuvable y compris, comme pour les noms de famille, une mauvaise retranscription. Je n’ai choisi de présenter que les cas les plus courants, n’hésitez pas à partager en commentaire vos propres déboires face aux communes fantomatiques.

            Bonnes recherches à tous.

  

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