Pour le « Mince alors… » de janvier, j’ai souhaité vous surprendre un peu avec une question qui laissera les débutants, à qui cette rubrique est destinée, et les généalogistes expérimentés sûrement dubitatifs. L’idée m’est venue en répondant à une sollicitation sur un groupe d’entraide, quand j’ai demandé une fourchette pour aider plus précisément la généalogiste en question. Je me suis rendue compte que la « fourchette » n’est souvent pas utilisée par les débutants alors qu’elle est sous leurs yeux et peut souvent leur faciliter la vie. Je vous propose donc de découvrir cet outil et son utilisation dans ce court « Mince alors… ». Pour cela nous retrouvons notre ami Néo GENEA, généalogiste fictif que nous avons déjà croisé dans de précédents articles.
Où vais-je trouver une fourchette
généalogique ? Vous vous doutez bien que je ne vais pas vous envoyer
chercher des couverts dans votre tiroir de cuisine. La fourchette est une
période établie, selon différents indices, durant laquelle un fait a pu se
produire. Néo GENEA trouve régulièrement
ce type de notation dans les arbres en ligne : « Yves LE ROUX décédé
entre 1780 et 1800 ». Ce mot « entre » indique que le
généalogiste propose une fourchette de dates. Si la première réaction face à ces informations est parfois la déception, l’information est imprécise, ce dont
le généalogiste a horreur, c’est en réalité un détail précieux. Vous savez
désormais ce qu’est une fourchette, en généalogie. Savoir les identifier c’est
bien, mais apprendre à les établir c’est mieux. Neo GENEA se penche alors sur un aïeul qui lui pose problème depuis
quelques temps, la date de décès d’un arrière-arrière-grand-père, Hervé MARTIN,
lui échappe.
Pourquoi établir cette fameuse fourchette ?
Il arrive, souvent, qu’une date primordiale nous résiste, une naissance ou un
décès par exemple. On a parfois l’impression de chercher une aiguille dans une
botte de foin. Il suffit souvent de se poser pour établir une fourchette qui
réduira le champ des recherches. Si vous devez éplucher les recensements, les tables décennales ou les table des
successions et absences vous serez heureux de réduire au maximum la période de
recherche. Si vous demandez de l’aide, vous ferez gagner un temps fou à ceux qui
voudraient vous prêter main forte en proposant une fourchette qui montrera que
vous avez déjà bien défriché le champ de recherche. Ce conseil s’ajoute à ceux
déjà donnés dans un précédent article : Mince
alors… Mes demandes d’aide en ligne restent lettre morte, que faire ? Quand
vous ne trouverez pas une date, ne laissez pas immédiatement tomber car, même
si l’exactitude est le graal du généalogiste, il faut parfois accepter une
étape d’approximation pour avancer. Neo
GENEA cherche absolument à établir la
date de décès d’Hervé MARTIN dont il possède l’acte de naissance (1860) et l’acte
de mariage avec Marguerite LE BRAS (1885), mais il pense n’avoir aucune piste
pour compléter le triptyque de base avec l’acte de décès.
Comment établir une fourchette de dates ?
Pour établir une fourchette généalogique vous allez, plus que jamais, vous transformer
en enquêteur dépourvu d’informations concrètes. Oubliez un instant que vous
cherchez un acte précis ou une côte d’archive. Vous allez pécher des
informations minuscules parfois. Vous allez surtout aller fouiller dans des
documents où la personne qui vous intéresse a un rôle secondaire, elle n’est
pas le sujet principal de l’acte.
Ainsi Néo GENEA va commencer par essayer d’établir la
liste de tous les enfants du couple Hervé MARTIN x Marguerite LE BRAS. Il en a trouvé
6, nés entre mars 1886 et septembre 1907.
Pour la naissance du dernier enfant, Hervé est en vie. Néo sait donc
que son aïeul est toujours vivant en septembre
1907. Deux de ses enfants se sont mariés. François MARTIN en mars 1922 et Jeanne MARTIN en février 1923. Deux dates proches où
Hervé est bien présent. La femme d’Hervé est décédée en décembre 1930, déclarée par son fils François. Il est indiqué qu’elle
est la femme de « feu Hervé MARTIN ». Hervé est donc mort avant cette date. Voici
comment Neo GENEA réduit sa période de recherche : février 1923 – décembre
1930.
Néo vient de se rendre compte qu’il en sait finalement plus qu’il ne le pensait. Pensez
toujours à recouper les informations. Un autre indice va bientôt surgir et
réduire encore la fourchette établie. En
reclassant les actes de baptême de ses grands-parents, il découvre qu’Hervé
était le parrain de son petit-fils, le grand-père de Néo : Jean MARTIN.
Celui-ci est né en juin 1925. Hervé
était donc encore en vie. Ainsi pensez aussi aux actes des archives diocésaines,
souvent moins consultés pour la période contemporaine.
Une
dernière piste va orienter les recherches de Néo. Dans les archives d’un journal local, en ligne, daté d’octobre 1926,
le généalogiste trouve une mention d’Hervé MARTIN, s’étant fait voler sa bicyclette
juste devant son logement. L’adresse correspond à celle de son aïeul, ce n’est
donc pas un homonyme. Pas de doute Hervé, était toujours en vie en 1926.
Faut-il indiquer une fourchette de dates dans ses
recherches ? Malgré sa
détermination, Néo n’a toujours pas retrouver le décès qu’il cherchait mais il a
largement réduit sa période de recherche, entre octobre 1926 et décembre 1930.
Peut-il pour autant en faire état sur son arbre en ligne ? Les fourchettes
ont tout à fait leur place dans vos arbres. Vos recherches n’ont pas besoin d’être
abouties pour figurer en bonne place dans vos branches. Votre arbre n’est pas
une vitrine mais un carnet de bord. La plupart des logiciels ont désormais
intégré des fonctionnalités pour rentrer des dates approximatives : avant,
après ou entre sont acceptés dans le champ « date » du logiciel.
Parfois la date restera introuvable durant des années mais vous gardez une
trace des démarches que vous avez faites, c’est le plus important. Une
fourchette de dates est parfois perçue comme une frustration, un échec ; pour
moi c’est une promesse de pouvoir encore progresser dans une recherche.
La
généalogie peut se délecter de "l’à peu près" tant qu’il n’est qu’une étape pour
aboutir à un résultat plus probant. La fourchette fait partie de ces démarches
qui nous laissent parfois sur notre faim (vous auriez bien aimé savoir si Néo
va trouver la date de décès d’Hervé) mais qui sont essentielles pour progresser sur les
cas un peu plus ardus. On ne remonte pas toujours d’acte en acte facilement,
les mentions marginales ou les renvois à un autre acte sont loin d’être
systématiques, c’est même à la marge dans le volume d’acte que vous traiterez.
La fourchette c’est l’âme de la généalogie : collecter, agréger, sauter d’un
fonds d’archives à l’autre pour dénicher les indices nécessaires. J’espère que
ce « Mince alors… » vous sera aussi utile que les autres articles de
cette rubrique qui restent la plus plébiscitée par les lecteurs du blog.
Bon début d’année à tous et que vos recherches soient fructueuses.
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