"Le défi des druides", véritable mise en lumière des Gaulois ?

 

Fut un temps, dont ma bibliothèque témoigne, où je lu beaucoup sur les Gaulois. 
Pour autant, je ne me suis pas intéressée à sa représentation dans la littérature jeunesse.

            J’ai suivi dernièrement des élèves de 6^e. J’ai réalisé avec eux que mes références en littérature jeunesse autour de l’Antiquité commençaient à dater. Si l’Affaire Caius rencontre toujours un franc succès auprès de mes élèves, ou que les mystères romains n’ont pas pris une ride, je voulais allonger ma liste. Je me suis aperçue que les grands absents de mes recommandation étaient les Gaulois. Des romans sur les Grecs, les Egyptiens et les Romains aux quatre coins de l’Empire, je n’en manque pas, mais mes lectures de jeunesse ne m’avaient presque jamais emmenée en Gaule. C’est assez dôle quand on y pense, puisque c'était le sujet de mon mémoire de recherche. Me voici donc partie à la recherche d’une première lecture sur le thème, je tombe, dans le catalogue de la bibliothèque municipale sur Le defi des druides.

            Signé Evelyne Brisou Pellen, l’ouvrage m’était inconnu, pourtant j’ai souvent pioché dans sa longue bibliographie. Le récit transporte le jeune lecteur à l’ouest de la Gaule, en Armorique, avec pour guide Sencha, un jeune homme de dix-sept ans qui rentre au pays après des années d’études druidiques sur l'île de Bretagne. On nous dresse le portrait des populations locales versées dans le commerce et l’artisanat, mais guerrières dans l’âme. Sencha y retrouve sa famille, ses amis et le druide qui a dirigé ses premières années d’étude. Nous assistons alors à la bascule entre des relations commerciales possibles avec les romains et l’irruption de la guerre. Nous voyons progressivement l’effondrement des guerriers gaulois avec la question sous-jacente de la disparition de leur culture. Des tensions entre les chefs gaulois à la bataille navale de l’armée romaine contre les Vénètes, nous accompagnons un groupe hétéroclite d’enfants dont le plus jeune n’a que 10 ans.

            J’ai moyennement adhéré au livre. J’ai trouvé le rythme difficile, peut-être un peu décousu et il manquait, à mon goût, une vraie fin. On a l’impression d’une certaine précipitation qui sonne faux. Elle ne se serait justifiée que si elle avait été conçue comme le prélude à un tome 2. Le livre change souvent de lieu, sans crier gare, et se focalise sur de nouveaux personnages. Par ailleurs, le grand nombre d’ellipses temporelles peut déstabiliser les petits lecteurs et rendre le suivi des aventures de Sencha complexe. Le roman est marqué par la mort de nombreux innocents y compris parmi les personnages principaux, on en ressort tout de même attristé pour ces destins brisés et dispersés.

            L’ouvrage date un peu, édité la première fois en 1988, il mériterait une analyse détaillée pour relever les quelques clichés qu’il véhicule sur les Gaulois. Néanmoins, il offre une ouverture intéressante sur le monde des Celtes d’Armorique dont on montre à quel point cette civilisation avait diversifié ses activités, volet que beaucoup de mes élèves ignorent. Le livre explique particulièrement bien le rôle des druides et l’étendue de leur connaissance, loin du traditionnel Panoramix. J’envisage de lire Rendez-vous à Alésia, signé aussi par Evelyne Brisou-Pellen, beaucoup plus récent pour compléter ma liste de lectures sur les Gaulois .

            Mon mémoire de master de recherche portait sur La représentation des Gaulois dans les manuels scolaires (1870-1945). Quand j’ai parcouru sur internet les fiches consacrées au Défi des druides, j’ai chancelé en découvrant que certaines erreurs que j’avais pu relever dans les supports scolaires de la IIIe République étaient encore diffusées. Un exemple sur le site du collège des Petits sentiers à Lucé où le roman se trouve classé dans "Aventures au Moyen âge". 

            Les exemples ne manquent malheureusement pas, même si le roman se situe à l’époque de César, ça ne gêne pas grand monde d’en faire une aventure médiévale. Certaines médiathèques comme celle d’Evreux font la même erreur. On le retrouve aussi dans une bibliographie « Les récits sur le Moyen-Age » sur le célèbre portail Weblettres. Je peux continuer ainsi, je pense que vous avez compris l’idée, alors qu’Evelyne Brisou Pellen nous offre un livre qui donne tout de même une belle épaisseur à la civilisation gauloise, l’exploitation qui peut en être proposée réduit parfois le travail à néant. Si vous souhaitez vous faire votre propre opinion sur ce livre, sachez qu’il est disponible dans le réseau des bibliothèques nantaises.

            Bonne lecture à vous