samedi 30 novembre 2024

Mince alors… Mon aïeul a-t-il fait entendre sa voix en 1789 ?

 



            On entend souvent parler des cahiers de doléances dans les cours d’histoire. Pour autant, qui d’entre nous a pris le temps d’en consulter un ? Il faut savoir que ces cahiers couvrent des thèmes très variés et qui changent selon le type de commune sur laquelle on travaille. Entre une commune rurale et une commune urbaine nous n’aurons pas exactement les mêmes revendications. On retrouve souvent des inquiétudes ou des contestations à propos des impôts.

Il faut s’armer de patience car la lecture est parfois difficile. En généalogie, cette démarche permet de nourrir la représentation que nous avons du monde de nos ancêtres, de comprendre les problèmes locaux. Ainsi on peut percevoir, à la veille de la Révolution, les soucis que rencontrent les communes de nos ancêtres. Il n’est pas impossible non plus d’y croiser leur nom.

Aujourd’hui les archives départementales sont de plus en plus nombreuses à les mettre en ligne, en numérisant les originaux et/ou les transcriptions, ces dernières facilitant grandement la lecture.

I - Les cahiers de doléances, pourquoi et par qui ?

I.a - La mise en place complexe des cahiers de doléances

Les cahiers de doléances de 1789 sont les héritiers d’une longue tradition. En effet, ce type de cahier n’est pas une invention de la Révolution. Pour cela il faut revenir à la définition des Etats généraux. Lancés au XIVe siècle, ils permettent à la monarchie de réunir les trois ordres : le clergé, la noblesse et le tiers-état. Attention, la définition de ce dernier évolue durant les presque cinq siècles d’existence des Etats généraux. Au départ on distingue deux réunions, celle des pays de langue d’oïl et celle des pays de langue d’oc. Cette distinction disparaît à la fin du XVe siècle. C’est à ce moment que se mettent en place les cahiers de doléances, ils permettent de faire un état des lieux des réclamations locales. A terme, ils servent à organiser aux mieux la réunion des Etats-généraux.

Pour 1789, le système est déjà bien abouti. Du moins pour les deux premiers ordres qui rédigent des cahiers communs. Coté Tiers-état on tâtonne un peu plus, les cahiers de doléances sont en fait la synthèse de cahiers produits dans le cadre de la paroisse ou de la corporation. Il faut trois assemblées différentes pour arriver aux résultats que nous consultons aujourd’hui. Attention ces cahiers qui font la synthèse restent différents d’une localité à l’autre puisqu’il n’y a pas de consignes précises sur la forme de la rédaction.  

I.b – Qui participe à la rédaction ?

Les cahiers de doléances doivent être rédigés selon les débats des assemblées. Sont invités à participer les hommes de plus de vingt-cinq ans. Ce sont les principaux appelés, quelques dérogations existent pour certaines femmes, hors Tiers-état. Il existe des cahiers de doléances rédigés par des femmes. Le moment est propice à certaines initiatives parallèles et, souvent, individuelles, comme le Cahier des doléances et réclamations des femmes de Madame B…B… [1].  Restent aussi les cahiers issus de corporations très féminisées.

Il faut retenir que, globalement, les assemblées destinées à la rédaction des cahiers de doléances sont une réussite si on se base sur le taux de participation. Il faut à la fois des réunions pour discuter des cahiers à venir mais aussi des élections en bonne et due forme. En effet, il faut élire les représentants qui vont porter la parole de l’ensemble du territoire. Malgré de nombreuses difficultés, les paroisses qui ne rédigent pas un cahier de doléances sont rares[2]. Vous avez donc toutes les chances que ceux du lieu de résidence de vos aïeux aient existé. On estime le nombre de cahiers produits à 60 000.

La richesse, pour le généalogiste amateur, c’est d’y trouver parfois les noms de ses aïeux, mais surtout, de pouvoir comprendre le contexte dans lequel ils évoluent.  

 

II – Inégalité d’accès aux fameux cahiers de doléances

Les cahiers n’ont pas fait l’objet d’une politique de conservation précise. Nous allons nous concentrer sur ceux disponibles en ligne, principalement via les sites des archives départementales. Néanmoins vous pouvez toujours vous référer à la page de France Archives intitulée « Rechercher un cahier de doléances de 1789 ». Cette page vous indiquera directement si vos archives départementales ont mis en ligne les cahiers de doléances. N’oubliez pas de tenter votre chance sur Gallica si vous en avez le courage. Certains départements, plus généreux, ont proposé des cahiers de doléances antérieurs à 1789, comme aux archives départementales du 44.

J’espère que cette source vous offrira de nombreuses heures de recherche et vous permettra de découvrir une autre facette des localités où ont vécu vos ancêtres. On se retrouve bientôt pour une lecture sur le thème de la Révolution.  



[1] Envie d’en savoir plus ? Une lecture : Jürgen Siess, « La construction discursive de la légitimation : le Cahier des doléances et réclamations de Madame B… B… 1789  », Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 21 | 2018, mis en ligne le 15 octobre 2018.

[2] Si le sujet vous passionne, direction cette lecture : RATEAU, Philippe. Les cahiers de doléances : Une relecture culturelle. Nouvelle édition [en ligne]. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2001

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