lundi 11 novembre 2024

« La guerre des Lulus », une série sur la vie des civils durant la Grande Guerre


            Chaque 11 novembre, je vous propose un article centré sur la Première Guerre mondiale et ses mémoires. Depuis plusieurs années on m’a recommandé la lecture de la série La guerre des Lulus, j’ai donc enfin pris le temps de l’emprunter à la bibliothèque. Avec 11 tomes, bientôt 12, je ne me suis pas ennuyée, même si ça se lit très bien, très vite. Cette série pour la jeunesse se divise actuellement en 3 cycles de BD ainsi que des romans. Sur ces derniers je ne vais pas revenir car je n’ai pas eu le temps de les parcourir, mais ils reprennent, a priori, la même histoire que la version BD. Je les ai lus dans l’ordre de parution, pas forcément le plus judicieux, on en reparlera plus loin.

            L’histoire commence à l’été 1914, dans un orphelinat d’un petit village français. Les enfants vivent sans savoir que la guerre est à la porte de l'abbaye. Quatre garçons, compagnons de chambrée, âgés de 11 à 15 ans, forment la bande des Lulus, inséparables. Lucas, Lucien, Luigi et Ludwig s’apprêtent à traverser la guerre. Oubliés lors de l’évacuation de l’institution, nous allons les suivre durant les quatre années du conflit.

            Tome 1 - La maison des enfants trouvés : Vous allez y rencontrer nos quatre personnages principaux mais aussi, rapidement, Luce. Cette jeune réfugiée belge arrivera à devenir un membre à part entière de la bande. Dans ce volume, la mise en place de l’histoire traîne peut-être un peu en longueur. J’avoue avoir hésité à continuer après avoir refermé ce premier tome. Le plus de cet opus ? Nous offrir un point de vue plutôt inhabituel de la vie des civils à la limite du front. Pour prolonger cette lecture ? Je vous conseille vraiment pour vous, ou votre adolescent, la lecture, Grandes vacances 14/18, témoignage d’une enfance vécue sous occupation allemande.

Tome 2 - Hans : J’ai persévéré dans ma lecture, et j’ai bien fait. le tome 2 m’a beaucoup plus accrochée. Ici, les enfants sont confrontés à la rencontre avec l’ennemi, un soldat allemand, déserteur de son état. Je ne vous en dirai pas plus. Les atouts de ce tome ? On donne un visage aux soldats allemands. On montre la souffrance partagée dans les tranchées, les désespoirs des soldats arrachés à leur vie. On affronte aussi la lucidité cruelle de certains adultes, conscients qu’ils auraient pu être bons voisins sans la guerre, mais qui n'hésitent pas désormais à tuer l'étranger. A plusieurs égards c’est un peu la fin de l’enfance pour les Lulus. Pour aller plus loin ? Les livres pour les enfants, sur la vie dans les tranchées, ne manquent pas, vous pouvez aussi proposer aux élèves de s’intéresser au travail de reconstitution des parcours des soldats avec un petit livre : Le mystère du poilu.    

Tome 3 – Le tas de briques : C’est un tome assez sombre puisque commence l’exil des Lulus. Ils quittent les bois de l’orphelinat et rappellent ainsi le destin des milliers de déplacés par la guerre. Finalement c’est à Guise, dans le familistère, que s’écrit la suite de leurs histoires. C’est un tome marqué par plus d’actions, parfois un peu rocambolesques à mon goût. Le point fort de cette étape du récit ? Le tome permet encore de mettre en avant la place des civils, ceux obligés de cohabiter avec l’armée allemande. Dans le familistère réquisitionné, vivent côte à côte soldats et habitants. Pour compléter cette aventure ?  Si vous avez l’occasion de visiter le fameux familistère, c'est une bonne continuité. Guise n’est pas à côté de chez moi, mais j’espère un jour y passer.

Pour savoir ce qui se passe entre le tome 3 et 4. Il faut lire les deux tomes « La perspective de Luigi ». Vous pouvez donc faire une pause et vous y plonger, puis vous pourrez reprendre la série classique. Sinon vous terminez les 5 premiers tomes et vous lisez ensuite les deux extras. La perspective de Luigi s’attarde sur les mois passés par les Lulus en Allemagne, notamment au camp d’Holzminden où ils sont entassés avec de nombreux étrangers. Le plus de cet épisode en deux tomes ? Bien que les péripéties puissent paraître un peu tirées par les cheveux dans cet opus, il offre la possibilité de découvrir les difficultés des populations outre-rhin et la situation des otages français.   

 Tome 4 – La déchirure : Nous retrouvons nos cinq héros grandis, même endurcis, dans une Belgique de 1917 où les tensions entre eux se marquent. C’est aussi les premières séparations qui s'esquissent puisque Luce revient sur sa terre natale et espère des nouvelles de sa famille. L’importance de cette bande-dessinée ? Le tome met en avant le poids de l’occupation et les conséquences dramatiques de la présence de l’armée pour la population belge. Pour ancrer cette aventure dans la réalité ?  La présence d’un éléphant dans un champ intriguera peut-être votre ados, l’occasion de lui parler de la réquisition des animaux par les armées et suggérer la lecture du célèbre Cheval de guerre de Michael Morpurgo. Vous pouvez aussi aller feuilleter l’album des archives du Cher, à la vue 22, vous verrez un authentique éléphant aux labours.

Tome 5 – La Ders des ders : Si on associe souvent le mot résistance à la Seconde Guerre mondiale, ce tome permet de mettre en lumière un réseau belge primordial. C’est le tome qui va définitivement projeter les aînés du groupe sur le front, sans uniforme militaire, et séparer nos 4 héros originels. L’atout de ce dernier tome ? Ce qui aurait pu être une conclusion avec l’armistice s’avère être le point de départ d’un nouveau cycle. Je trouve que c’est une très bonne chose de montrer que le 11 novembre est loin d’être la fin des malheurs des populations. La suite ? Ici le meilleur conseil est d’enchaîner le plus rapidement possible les tomes suivants qui permettent de découvrir ce qu’il est advenu des quatre enfants, et surtout comprendre le long processus de reconstruction des pays après la guerre.


Les tomes 6, 7, 8 et 9 : Que sont devenus les Lulus et leur amie Luce après la guerre ? Mutilé par la guerre, prisonnier des allemands, seul sur les routes de Belgique, isolé dans un orphelinat hollandais, rien ne semble pouvoir réunir les Lulus. Dans ce deuxième cycle, qui sera bientôt complété par un dernier tome, on explore donc les conséquences de la guerre : champs minés d’obus, développement des prothèses, arrivée de la grippe espagnole, reconstruction des villages français et belges… Je trouve intéressant d’évoquer ce monde d’après-guerre dans une œuvre accessible aux collégiens tout en donnant de l’épaisseur à des personnages dont on aurait pu craindre d’avoir fait le tour. J’ai presque préféré cette seconde partie de la série et j’attendrai avec impatience la lecture du dernier tome consacré à Ludwig.

L’avantage de se lancer maintenant dans cette série, c’est vous n’aurez pas à attendre entre chaque tome. Son succès fait qu’elle est facilement accessible dans les librairies, bouquineries, bibliothèques des écoles et collèges et dans de nombreuses médiathèques. A lire dès le CM2, elle est aussi utile pour le programme de 3e et ses chapitres consacrés à la Grande Guerre. Si la qualité des tomes est inégale et certaines péripéties improbables, la série à tout pour séduire nos collégiens. Casterman ne s’y est pas trompé et continuera, je pense, à exploiter le filon, une adaptation au cinéma existe déjà pour les 3 premiers tomes, ainsi que des romans comme évoqués plus tôt.

Je vous retrouve bientôt pour de nouvelles lectures.  

   

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