Le hasard a mis entre mes mains, la même semaine, deux ouvrages qui évoquent les jeux Olympiques de 1928. Je vous ai déjà présenté, il y a quelques temps, la bande-dessinée Marathon de Nicolas Debon. Elle relatait la victoire française d’un jeune coureur d’origine algérienne qui, à la surprise de tous, triomphait dans le stade d’Amsterdam. Aujourd’hui je vous propose un roman jeunesse qui relate le parcours d’un autre dossard en or, le 879 au sprint. Il s’agit de Betty Robinson, une jeune américaine qui a définitivement marqué l’histoire des jeux. Suivre ses pas c'est aussi découvrir l’Amérique des années 1920 et 1930. Collégienne, j’avais gardé un bon souvenir des livres de Philippe Nessmann, j’avais lu alors trois volumes de sa collection « les découvreurs du monde ». Quinze ans après, j’avais oublié jusqu’au nom de l’auteur, alors que deux livres traînent encore dans ma bibliothèque. Au détour des catalogues de la médiathèque je suis tombée sur une de ses dernières publications Une fille en or. J’ai fait confiance à mes goûts littéraires des années 2000 et j’ai parcouru les pages de ce roman à la vitesse d’un sprint.
Nous allons suivre la carrière de
Betty Robinson le temps de deux olympiades de 1928 à 1936, c'est à dire les jeux d'Amsterdam, Los Angeles et Berlin. Ce sont ceux auxquels
son jeune âge, au début de sa carrière, la destinait à participer. La jeune fille
de Riverdale (rien à voir avec la série à succès), une ville à deux pas de
Chicago, issue de la communauté irlandaise, fréquente le lycée et s'inscrit dans une vie confortable d'une Amérique rêveuse dont l’économie semble au
beau fixe. Le destin de Betty bascule lors d’une situation on ne peut plus
banale. La lycéenne manque de rater son train et spontanément s’élance pour le
rattraper avant qu’il ne quitte le quai. C’est à ce moment que l’entraîneur de
l’équipe du lycée, alors uniquement masculine, va la repérer.
Le roman de Nessmann va, pour commencer, relater les six mois qui la séparent des jeux Olympiques. Cette
première partie du roman est l’occasion d’une série de portraits de l’entourage
de la jeune sprinteuse. On découvre d’un côté plusieurs soutiens (masculins comme féminins)
qui croient en elle comme son père, son entraîneur, les femmes de l’IWAC (club
qui réunit les femmes de l’élite de Chicago) ; de l’autre de nombreuses
figures réticentes, par exemple sa mère, sa meilleure amie et les garçons du
club d’athlétisme. Tout semble aller trop vite pour la jeune fille et sa
famille. Première compétition au bout de deux mois, sélection pour les jeux quelques semaines plus tard et
départ de New York dans la foulée sans même avoir le temps de revenir à Chicago. Les jeux de 1928
c’est la naissance d’une étoile américaine, avec la victoire en or de Betty
Robinson, 16 ans, inconnue encore l’année précédente. L’auteur détaille sa
victoire mais aussi l’après, le retour, la gloire, et les retrouvailles avec la
famille.
Nessmann s’attarde ensuite sur la chute terrible de l’athlète qu’un accident d’avion va presque laisser pour morte. L’auteur propose alors de relater le chemin que doit parcourir la jeune femme de 19 ans pour se reconstruire. Il faut faire le deuil de la compétition de Los Angeles dans une Amérique qui affronte les conséquences de la crise de 1929. C’est ainsi que l’enthousiasme de la première partie est remplacé par une angoisse, un doute permanent du lecteur qui se demande qui rompra en premier dans la famille Robinson. Le père de Betty perd son travail et sombre progressivement alors que sa fille peine à retrouver un objectif avec sa jambe blessée qui la prive de sa passion. De plus la crise financière la force à arrêter ses études. Oubliée de tous, Betty mettra longtemps à envisager un retour à la compétition. Pourtant elle se battra pour obtenir une place dans la délégation américaine de 1936 pour Berlin. Je vous laisse découvrir dans les pages du roman la suite de son parcours qui permet d’aborder énormément de thèmes comme la montée des fascismes en Europe et l’utilisation politique des jeux. Avant un défi sportif c’est un dilemme qui s’impose à la jeune américaine, si elle avait la possibilité de partir, le ferait-elle ? Serait-ce soutenir Hitler que de participer à ses jeux ?
Plus vous avancerez dans ce roman, plus vous constaterez qu'il gagne en intérêt. Le livre est riche de multiples
pistes de réflexion, même s’il est classé jeunesse sa lecture est agréable pour
tous. L’année à venir, je le conseillerai en particulier à mes élèves de 3e
et de Terminale. Même si le programme du brevet est centré sur l’entre deux
guerre en Europe, une pincée de points de vue américains ne nuit pas, surtout avec
l’évocation des enjeux politiques des jeux Olympiques. Il y a aussi des pistes à
creuser pour le programme d’éducation morale et civique sur la question de
l’égalité puisque le livre s’attarde aussi bien sur la place des femmes que sur la
ségrégation dont sont victimes les athlètes noirs qui concourent avec Betty. On note aussi les nouvelles possibilités que le XXe siècle offre aux femmes en terme de carrière et de vie familiale. Le
livre me permettra d’avoir un nouveau complément pour le chapitre de
terminale « L’impact de la crise de 1929 : déséquilibres économiques et
sociaux ». S’il n’entre pas dans les détails, il permet de se mettre dans
l’ambiance de l’époque et de survoler quelques grands thèmes, c’est une fenêtre intéressante. Comme pour la bande-dessinée Marathon, je vous invite à compléter
cette lecture par le film La couleur de la victoire.
L'auteur propose une page de son site pour découvrir des documents originaux à propos de la sportive (photos et articles de presse d'époque). J’espère que cette lecture vous sera
utile, pour vous, vos enfants ou vos élèves. Pour ma part je repars à la
bibliothèque découvrir d’autres ouvrages du même auteur. Si vous avez certaines
références à me conseiller de la même plume ou sur le même thème n’hésitez pas
à me les indiquer en commentaire.
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