Il y a un bon moment que je n’ai pas présenté une bande dessinée sur le blog. Mon regard errait dans les rayonnages de la bibliothèque quand je me suis arrêtée sur Après la rafle. Je ne découvre pas vraiment cette histoire, puisque je connais déjà en partie le parcours de Joseph Weismann. En cela, l’avis que je vais vous livrer est partiellement biaisé.
Printemps 2010, je suis en seconde. J’ai étudié le XXe siècle en long, en large et en travers l’année précédente. La Seconde Guerre mondiale est un sujet encore frais dans ma mémoire que j’ai dû compléter par quelques lectures personnelles. C’est à cette époque que j’ai lu Cours sans te retourner, Mon ami Fréderic ou Bonne nuit Monsieur Tom et bien d’autres livres que je conseille encore à mes élèves. C’est donc logiquement que, lorsque La Rafle sort au cinéma, je vais découvrir ce film dont on parle beaucoup. J’en suis très marquée bien que la rafle du Vel d’hiv ne me soit pas inconnue. En primaire j’avais lu « Un enfant s’évade » dans la revue histoires vraies, j’y avais découvert cet épisode dramatique de la guerre. Plus tard j’aurai l’occasion de voir une grande émission avec des témoignages, j’y redécouvre le vrai Joseph Weismann, qui commente à nouveau son histoire que le film a portée à l’écran. J’écoute avec attention Annette Muller dans ce même enregistrement, je lirai par la suite son témoignage La petite fille du Vel' d'Hiv. Vous comprenez donc que, lorsque j’attaque la lecture d’Après la Rafle, je ne suis pas comme un jeune lecteur, j’ai un passif qui fait que j’aurai du mal à savoir comment cette lecture pourrait être reçue par mes élèves. Je ne sais pas si j’aurai réellement adhéré à l’ouvrage si je ne l’avais pas vu comme un complément au film.
Votre
lecture sera différente si vous avez visionné la Rafle auparavant car elle comblera certaines interrogations
restées en suspens. Une ellipse dans le long métrage éludait le destin de
Joseph entre son évasion et la libération. La bande dessinée relate le chemin de
croix que fut la suite de la guerre pour lui, la rafle du Veld’hiv n’étant que
le début de son calvaire. Il faut ensuite se cacher, être rejeté, exploité. Le
livre raconte aussi la reconstruction d’un enfant qui doit devenir homme en
admettant que sa famille ne reviendra jamais. Le point de vue reste très différent du film puisque l’album ne repose
que sur la vie de Joseph Weismann là où le film relatait aussi le destin d’autres
enfants et d’adultes comme Annette Monod. La bande-dessinée souhaite nous raconter
ce qu’il est advenu du petit juif qui avait réussi à s’échapper en rampant sous
les barbelés. Cet enfant là restera le héros de Beaune-la-Rolande, cette image d'évadé lui colle à la peau dans les années qui suivent son évasion.
La
mémoire est le fil rouge du récit avec pour point de départ les retrouvailles
avec son copain d’évasion, 23 ans après s’être quitté dans le Paris de la
guerre. C’est pour Joseph Weismann, que nous retrouvons alors père de famille,
un moment de bascule. Dans un cheminement parfois un peu décousu, nous suivons
les étapes qui amènent le dernier survivant des Weismann à être encore aujourd’hui
un acteur engagé dans le devoir de mémoire. Le récit explique les mécanismes et
la prise de conscience qui le mènent à s’engager dans un travail de témoignage
dont ce livre est une autre étape. De sa rage d’adolescent qui éclate face aux
injustices au vieil homme qui assiste à la reconstitution de la rafle sur le plateau
de tournage, nous assistons à chaque difficulté de ce chemin commencé un jour
d’été 1942.
Le préambule de cet album, rédigé
par Joseph Weismann, rappelle un chiffre : 75 % des juifs présents en France
au début de la guerre ont survécu. Joseph est de ceux-là et son récit offre une
idée des mains tendues qui permirent à des milliers de ces persécutés d’échapper
à l’horreur. Bien sûr, il raconte aussi les portes claquées et la dénonciation
à la gendarmerie. Le film m’avait imposé une grande émotion, l’album m’a
paru encore plus dur, plus cruel, surtout les expériences que vit Joseph après l’évasion.
Aujourd’hui,
ce récit s’inscrit aussi dans une thématique sur laquelle je ne m’interroge que
depuis peu : la réinsertion de ces enfants brisés par la Shoah. Je vous ai
déjà parlé ici du livre Orphelin 88 ou du film les Enfants de Windermer. Il rejoindra
mes conseils de lecture pour mes élèves. Je recommande tout de même, au moins
pour les collégiens, de visionner d’abord le film, qui bien qu’ayant pris
quelque liberté avec la réalité, reste un excellent support.
Je
vous retrouve bientôt pour d’autres conseils et supports pédagogiques.
Bonne
lecture.
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